Vous avez présenté une proposition de loi concernant la protection de l’enfance, instaurant un seuil d’âge pour les relations entre enfants et adultes. Pouvez-vous nous expliquer en quoi ce texte consiste plus précisément ?

La proposition de loi que j’ai déposée était faite pour proposer un seuil d’âge pour interdire les relations entre un adulte et un mineur. Nous partons d’un constat, auquel j’ai été confronté via mon parcours lié à la protection de l’enfance, et qui s’est révélé au public notamment via le livre de Camille Kouchner. Il est simple : il n’y a pas de seuil d’âge en France, les enfants étaient obligés de montrer leur consentement. Il s’agissait d’un parcours du combattant auprès des juges, durant lequel les enfants devaient prouver qu’ils n’avaient pas formulé de consentement. C’est quelque chose de très compliqué, car les adultes exercent une forte emprise, et inspirent parfois de la terreur. Ainsi, le « non » n’est pas forcément formulé. Il était nécessaire et urgent que la France se mette à niveau, notamment vis-à-vis de pays, comme le Canada, ou encore la Tunisie, qui ont fixé des seuils d’âge. La moyenne est fixée entre 14 et 16 ans. Nous avons choisi l’âge de 15 ans pour les relations avec un adulte, qui correspond à celui de la majorité sexuelle dans les textes de loi. En ce qui concerne le cas spécifique de l’inceste, aucun enfant n’y est consentant. Il était donc nécessaire de fixer le seuil à 18 ans.

 

Malgré le fait que le texte voté in fine ai été déposé par la majorité, il a repris vos propositions. Quelle a été son processus d’élaboration ?

Cette Loi est historique. Elle a été déposée en novembre, soit au tout début de mon mandat de nouvelle parlementaire. Elle a été rédigée avec un appui fort du groupe socialiste et des collaborateurs qui y travaillent, et en lien avec les associations. C’est une Loi qui a été travaillée de manière collective, et c’est un fonctionnement qui me plaît particulièrement. Lorsque le débat d’actualité s’est installé autour de cette question, les membres du gouvernement et les parlementaires LREM n’y était pas favorable. L’opinion publique les a amen à réviser leur position, pour reprendre celles que j’avais formuléIls ont décidé d’utiliser un autre cavalier législatif que le mien, mais nous pouvons être fiers de cette avancée majeure, qui nous est due. Nous n’avons pas attendu que l’actualité mette le sujet en avant pour légiférer.

 

Vous êtes particulièrement engagée sur la protection de l’enfance. Quelles propositions peut-on envisager pour faire face à ces situations de détresse profonde ?

Mon combat principal est axé sur la protection de l’enfance. En France, nous avons 101 départements et 101 politiques publiques différentes pour l’enfance en danger. Cela entraîne de grandes inégalités dans la prise en charge et le repérage des situations individuelles. Parmi les enfants qui grandissent en foyer, beaucoup sont mis à la rue le jour de l’anniversaire de leurs 18 ans. J’ai toujours interdit que cela se produise dans le Val-de-Marne, mais de nombreux départements en France le font. Ce sont des jeunes qui dans leur grande majorité sont fragiles, cela ne leur offre que la rue, l’errance, les addictions, parfois la prostitution. Quand tu n’as rien, tu n’as rien. Je souhaite faire évoluer la société pour que les départements puissent s’engager sur l’accompagnement des jeunes entre 18 et 25 ans. Nous ne pouvons pas les laisser au bord du chemin. Face à la crise actuelle, ces situations de précarité s’exacerbent. Je vais m’atteler à ce sujet comme Secrétaire Nationale du PS. En parallèle du cadre législatif, il faut donner naissance à une véritable volonté politique. Entre les régions et les départements, nous devons trouver des solutions pour accompagner ces 300.000 jeunes. Il faut créer une dynamique de synergie autour de la jeunesse, et en particulier des plus fragiles.

 

Source : La Maison des élus